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L'article
8 de la Constitution prévoit une peine de 3 ans d'emprisonnement
pour toute apologie du séparatisme.
Dans les 6 provinces placées sous état d'urgence dans le
sud-est de la Turquie, les personnes arrêtées pour des crimes
et délits qui sont du ressort des cours de sûreté
de l'État peuvent être détenues en garde à
vue jusqu'à 15 jours. Pour les autres régions, la durée
de cette garde à vue est de 7 jours.
Pour des cas individuels, la personne doit être déférée
devant le juge dans les 48 heures suivant son arrestation. La durée
maximale pour ouvrir un procès contre une personne inculpée
est limitée à 4 mois après son inculpation. Cette
limitation est introduite dans la législation par une loi du 6
mai 1998. Aucune limite n'existait avant cette date.
La
peine de mort est toujours inscrite dans la loi. Des personnes
continuent d'être condamnées à la peine capitale.
La dernière exécution date de 1984.
Le
chiffre exact de la population carcérale féminine
n'est pas connu. Les femmes sont détenues dans des parties séparées
dans les prisons pour hommes.
En octobre 1997, 43 femmes sont détenues à la prison d'Izmir,
33 se trouvent à la prison de Mersin (type E), 11 à la prison
fermée d'Ünye.
Dix mineures sont incarcérées à l'établissement
pour mineur(e)s d'Izmir.
De
très nombreuses exécutions extrajudiciaires sont
commises par les forces de sécurité. De sources non officielles,
26 532 membres du pkk, 5 185 membres des forces de sécurité
et 5 209 civils sont morts dans le conflit kurde, de 1984 à novembre
1997.
Andrea Wolf, 33 ans, de nationalité allemande, engagée dans
la lutte armée du Parti des travailleurs du Kurdistan (pkk), décède
dans des circonstances douteuses, le 22 octobre 1998. Ses compagnons déclarent
qu'elle aurait été arrêtée, interrogée
et abusée par des officiers turcs avant d'être exécutée
de sang froid à Keles, une localité de l'est
du pays.
Des
militantes d'extrême gauche ou des Kurdes sont souvent victimes
de détentions arbitraires et illégales. Le Code de
procédure pénale prévoit un enregistrement rapide
et en bonne et due forme des détentions ainsi que la notification
aux familles. Ces dispositions ne sont presque jamais respectées.
La durée de la garde à vue peut être considérablement
prolongée.
Ayse Aslan et sa fille de 12 ans, Muhabet, sont non officiellement privées
de liberté, le 30 janvier 1996. Les parents d'Ayse Aslan n'ont
aucune information sur le lieu de leur détention. La détention
arbitraire d'Ayse Aslan, ainsi que celle de sa fille, dure jusqu'au 20
mars 1996, date à laquelle elle est officiellement reconnue. Les
autorités confirment qu'elles seront traduites devant la cour de
sûreté de l'État de Diyabakir. Elles sont détenues
en attendant leur procès à la prison de Batman.
Les
détenues politiques ou d'opinion sont la plupart du temps des
Kurdes membres supposés du pkk, des militantes de partis d'extrême
gauche, des militantes des droits de la personne, des journalistes et
des écrivains.
Une vague d'interpellations de responsables, de membres et de sympathisant(e)s
du HEDP, parti démocratique populaire dont la majorité des
adhérents sont kurdes, débute le 22 juillet 1999. Des femmes
figurent parmi les personnes arrêtées : Hanim Köker,
membre du Comité des femmes du hadep, Dilek Demiral, secrétaire
générale de l'Union des fonctionnaires (KESK), Kilek Demiral,
Fatma Kurtulan et Fatma Nedim Vargün. Ces personnes sont arrêtées
sous le coup de la loi antiterroriste.
Depuis 1991, plus de 100 membres du hadep et des mouvements auxquels il
a succédé sont morts des suites de tortures, ont disparu
ou ont été victimes d'exécutions extrajudiciaires.
Zeynep Baran, présidente de la Fondation pour la solidarité
envers les femmes kurdes, est condamnée en 1998 à 2
ans de prison pour avoir publié une brochure présentant
son organisation.
Leyla Zana, élue députée de Diyarbakir en octobre
1991, est condamnée à 15 ans de prison en 1994 pour son
action en faveur des droits de la personne et de la reconnaissance du
peuple kurde. Première femme kurde élue députée
au parlement de son pays, elle est arrêtée après avoir
fait une déclaration en langue kurde au parlement. Elle est détenue,
seule dans une cellule, à la prison centrale d'Ankara. La lumière
de sa cellule reste allumée 24 heures sur 24.

Les
mauvais traitements et les actes de torture sont pratiqués
de manière systématique dans l'ensemble du pays. Ces actes
sont encore plus fréquents dans les 10 régions du Kurdistan
turc. La juridiction d'exception qui y sévit depuis 1987 encourage
le recours à la torture. Fréquemment condamnée par
la Cour européenne des droits de l'homme, la Turquie a fait
l'objet de 2 déclarations publiques du Comité
contre la torture (CPT), ce qui représente une sanction exceptionnelle.
Ces déclarations (1992 et 1996) soulignent que le recours à
la torture et aux mauvais traitements sont chose courante dans les locaux
de police turcs. Les méthodes de torture recensées par la
Fondation turque des droits de l'homme consistent notamment à
passer les victimes à tabac, à les dénuder entièrement
et à bander leurs yeux, à les exposer à un jet d'eau
glacé sous haute pression, à les pendre par les bras et
les poignets attachés dans le dos, à leur infliger des décharges
électriques, à leur assener des coups sur la plante des
pieds, à les menacer de mort et à leur faire subir des violences
sexuelles. Les victimes de tortures et leurs familles, ainsi que les défenseurs
des droits humains qui luttent pour que cessent les violences, sont harcelés
et intimidés. Les médecins qui rédigent des rapports
précis sur des lésions résultant de tortures subissent
le même traitement. Le taux d'acquittement des membres des forces
de sécurité contre lesquelles des poursuites sont engagées
est compris entre 88 % et 97 %, en 1999.
Les mères du samedi, proches des personnes disparues,
qui depuis plusieurs années manifestaient silencieusement chaque
samedi dans le quartier de Galatasaray, à Istanbul, ont cessé
de se rassembler en mars 1999. Depuis août 1998, elles n'ont pas
cessé de faire l'objet de mesures de harcèlement, de détention
et de mauvais traitements de la part de la police. Hanim Tosun, dont l'époux
avait disparu, affirme avoir été frappée
à coups de matraque, de pied et de poing lors de son arrestation
durant l'une de ces manifestations en septembre 1998. Elle a été
emmenée dans un véhicule de police en compagnie d'autres
personnes. Une séquence vidéo montre des policiers en train
de pulvériser du gaz poivré dans le véhicule avant
d'en fermer les portières, acte potentiellement mortel. À
la suite de cet incident, Hanim Tosun et 30 autres personnes doivent être
conduites à l'hôpital pour recevoir des soins.
Filiz Celik affirme avoir été torturée en détention
pendant qu'elle était enceinte. Son bébé est mort-né
en juillet 1999 dans une prison d'Istanbul.
Duygu Senem, qui aurait été battue durant sa détention
au poste de police d'Istanbul en avril 1998, affirme que la police a confisqué
son rapport d'examen médical.
Cinq policiers de la section antiterroriste d'Istanbul sont accusés
en 1997 d'avoir torturé Gulderen Baran pendant un interrogatoire
en 1995.
La journaliste Hatun Temizalp a été détenue pendant
7 jours en mars 1997, à la section antiterroriste d'Istanbul. Selon
son témoignage, les policiers qui l'ont interrogée l'auraient
injuriée, menacée et partiellement déshabillée.
Ils lui auraient attaché les deux bras à un bâton.
Deux personnes l'auraient saisie, l'auraient fait monter sur une chaise,
l'auraient pendue au plafond et auraient retiré la chaise. Mme
Temizalp aurait subi ce traitement à plusieurs reprises. Sous l'effet
de la douleur, elle aurait perdu connaissance. Selon un rapport de radiographie,
ce traitement lui aurait fracturé une omoplate. Conduite devant
un juge, Mme Temizalp a déclaré avoir été
torturée et a déposé plainte.
Sevgi Kaya, 15 ans, est arrêtée en février 1996 à
Istanbul. Elle est accusée d'appartenir à une organisation
interdite. Détenue au secret, elle est torturée pendant
12 jours. Les policiers la battent puis la déshabillent. Ils lui
attachent les mains avec une corde reliée à une poutre,
la hissent par les bras et la menacent de mort.
Zehra Aydin, professeure stagiaire, est arrêtée à
son domicile, le 11 juin 1996. Elle est transférée dans
le service des soins intensifs de l'hôpital de Diyarbakir, après
quelques jours de détention.
Döne Talun, âgée de 12 ans, est arrêtée
à Ankara, en 1996. Elle se plaint d'avoir été battue
et d'avoir subi des décharges électriques pendant les 5
jours passés au siège de la police d'Ankara pour interrogatoire.
Les policiers nient l'avoir arrêtée. Les rapports rédigés
par des médecins corroborent les accusations de torture formulées
par Döne Talun.
Les
détenues sont fréquemment victimes de violences sexuelles
et violées. Elles sont soumises à des contraintes de prostitution.
Des tests de virginité sont effectués, bien qu'ils soient
officiellement bannis des interrogatoires policiers par une nouvelle réglementation
entrée en vigueur en octobre 1998. Selon l'Association des médecins
turcs, des examens gynécologiques forcés sont pratiqués
avec pour seul but le viol de l'intimité de la femme détenue.
Des tortures sexuelles sont également pratiquées, comme
l'envoi d'un jet d'eau glacé ou l'introduction de divers objets
dans le vagin. Des personnes détenues peuvent être victimes
de harcèlement sexuel devant leur conjoint(e).
Medine Oncel, âgée de 22 ans, saute d'une fenêtre en
août 1999 pour éviter d'être de nouveau mise en détention
par la police antiterroriste. Sa famille affirme qu'elle a été
sévèrement battue et violée pendant sa détention
de 10 jours en novembre 1998 dans un centre de détention.
Une fille kurde âgée de 16 ans et Fatma Deniz Palatto, âgée
de 19 ans, sont détenues et torturées pendant 5 et 7 jours
respectivement en mars 1999 au poste de police d'Iskenderun. Elles doivent
rester nues pendant des heures, debout, dans des positions épuisantes.
La fille plus jeune est exposée à des harcèlements
verbaux et sexuels. Elle reçoit à plusieurs reprises des
coups sur ses organes génitaux, ses seins et autres parties du
corps. Elle est suspendue par les bras et arrosée avec de l'eau
froide sous pression.
Cinq femmes sont détenues incommunicado pendant 5 jours
en mai 1998 à Istanbul. Elles auraient été battues,
auraient dû rester debout pendant des heures et auraient été
victimes de harcèlement sexuel. Aynur Tokluoglu aurait été
fouillée à nu et aurait été suspendue par
les bras attachés derrière le dos.
En septembre 1997, la Cour européenne des droits de l'homme
estime que les forces de sécurité turques avaient effectivement
torturé Sükran Aydin, alors qu'elle se trouvait au siège
de la gendarmerie de Derik, en 1993. Sükran Aydin, âgée
de 17 ans au moment des faits, a été violée, exhibée
nue et rouée de coups.

La
séparation entre les femmes et les hommes détenus
est effective.
Les mineures incarcérées peuvent faire l'objet d'une
instruction judiciaire. Celle-ci porte sur leurs antécédents
familiaux, leur situation sociale, leur éducation et leur scolarité.
Les mineures en conflit avec la loi, âgées de 11 à
15 ans au moment des faits, et celles qui ont moins de 18 ans au moment
où est prise la décision de les sanctionner, doivent légalement
être envoyées dans un centre pour mineures. Dans les faits,
des mineures et des majeures sont parfois détenues ensemble. Leurs
conditions de détention sont similaires.
La
quasi-totalité des établissements récents
sont des prisons à régime spécial, destinées
aux personnes détenues pour motif politique. Appelées de
type M, L ou E, ces prisons sont éloignées des villes et
ne sont pas d'accès facile pour les familles. Deux à trois
femmes y sont placées par cellule. Trois centres d'éducation
surveillée et une prison pour femmes et mineures reçoivent
des filles. Tous les établissements réservés aux
mineures sont surpeuplés.
La prison d'Izmir se situe dans une banlieue résidentielle de la
ville de Buca. Elle est mise en activité en 1960. Elle accueille
des personnes prévenues ou condamnées.
L'établissement de Mersin (type E) est situé à environ
5 km, par l'autoroute, des villes de Mersin et Adana. Ses trois bâtiments
ont été construits en 1982. Les femmes et les mineures sont
détenues dans le bloc B, qui est aussi le bloc médical et
celui des activités.
La prison fermée d'Ünye est à la périphérie
de la ville d'Ünye. C'est un bâtiment de 2 étages qui
reçoit des personnes détenues de droit commun.
Les
cellules sont fréquemment surpeuplées. La lumière
peut rester allumée 24 heures sur 24. L'aération des cellules
est insuffisante. De nombreux parasites sont présents.
L'éclairage et la ventilation dans la prison d'Izmir sont médiocres.
Les cellules contiennent des lits superposés à 3 étages,
parfois si rapprochés que l'espace de passage est restreint. Les
détenues rangent leurs vêtements dans des casiers ou les
accrochent aux montants des lits. Des parties de l'établissement
ont été divisées en cellules de 7,7m2. Ces cellules
contiennent une ou deux personnes, mais sont équipées pour
en recevoir trois. Elles disposent de lits et d'un coin toilette à
demi-séparé avec un bassin pour se laver et un w-c, en très
mauvais état en 1997.
La prison de Mersin (type E) comprend, au premier étage du bloc
B, deux dortoirs et une grande cellule réservés aux femmes.
En 1997, le premier dortoir, d'une superficie de 35 m2, compte neuf femmes
et un enfant. Le second dortoir, d'une superficie de 55 m2, compte 24
femmes et quatre enfants.
Les cellules de la prison d'Ünye sont équipées de lits,
de tables, de chaises et de casiers. Elles sont plutôt propres.
Les prisonnières font des efforts pour décorer leur cellule.

L'alimentation
n'est ni équilibrée ni suffisante en quantité. Les
menus manquent de vitamines. Les féculents constituent l'essentiel
du repas. Les régimes spécifiques ne sont pas pris en compte
par l'administration, même ceux liés à des motifs
de santé. Les détenues dépendent des produits que
leurs familles apportent. Les produits alimentaires cantinables sont de
mauvaise qualité et leurs prix sont dissuasifs. Des cas sont rapportés
où le personnel de surveillance s'emploie à rendre immangeables
les aliments apportés au cours de visites.
Les repas de la prison d'Izmir sont variés chaque semaine. Les
détenues peuvent cuisiner et se préparer du thé ou
du café dans le réfectoire. Le matériel est délabré
et usagé.
Beaucoup de personnes détenues dans la prison de Mersin (type E)
se plaignent de la mauvaise qualité et de la monotonie des repas.
La cuisine est mal équipée.
Les
conditions d'hygiène sont très mauvaises. L'eau accessible
n'est pas toujours potable. Les toilettes et les douches sont en nombre
insuffisant et souvent en mauvais état. L'administration pénitentiaire
ne distribue que très parcimonieusement les produits sanitaires
aux détenues.
Chaque unité de la prison d'Izmir comprend deux w-c, deux lavabos
et une douche. La plupart des équipements nécessitent une
réparation, en 1997. Les détenues ont accès aux douches
une fois par semaine. Elles lavent elles-mêmes leur linge et leurs
draps.
Des personnes détenues à la prison de Mersin (type E) contestent
le manque d'hygiène, en 1997. Elles réclament davantage
de savon, aucune distribution n'ayant eu lieu pendant au moins 3 mois.
Seul le nettoyage des draps des mineur(e)s incarcéré(e)s,
des malades et des nouvelles arrivantes est assuré, les autres
détenues devant l'effectuer elles-mêmes. Des rats et des
cafards sont signalés dans les cellules.
Les
soins, même les plus élémentaires, dispensés
dans les prisons sont insuffisants. Les médicaments prescrits ne
sont pas toujours distribués. Tous les établissements ne
bénéficient pas de la présence d'un médecin.
Les détenues doivent alors être prises en charge par des
organisations de santé extérieures. Les médecins
spécialisés et les psychologues sont peu nombreux. Des obstacles
administratifs provoquent des retards importants pour les transferts de
détenues vers les hôpitaux publics. Les détenues sont
menottées, souvent de façon trop serrée, lors des
transferts. Des malades dissimulent leur état par crainte des mauvais
traitements qui ont lieu pendant les transferts. Les détenues hospitalisées
sont menottées ou enchaînées à leur lit pendant
la totalité de leur séjour. Des gardes sont présent(e)s
pendant les examens. Les détenues en stade final d'une maladie
ne bénéficient pas systématiquement d'une libération
anticipée.
La confidentialité des dossiers médicaux n'est pas toujours
respectée, les feuilles de prescriptions médicales pouvant
être transmises du médecin au directeur de la prison sans
enveloppe.
Trois médecins travaillent à la prison
d'Izmir. Un(e) psychiatre et un(e) ophtalmologue interviennent deux fois
par semaine. De nombreux cas d'automutilations sont relevés
chez les mineures, en 1997.
Aucun médecin ne travaille à plein temps à la prison
de Mersin (type E), en 1997. Le personnel soignant, composé d'un
médecin à temps partiel, d'un dentiste, d'une infirmière
et d'un psychologue, n'a pas la possibilité d'examiner systématiquement
chaque nouvelle personne entrante. Ce sont les surveillants qui adressent
ces personnes aux médecins.
Les
détenues enceintes peuvent, d'après la loi, accoucher
et être prises en charge par un hôpital extérieur.
L'administration pénitentiaire n'accorde pas systématiquement
l'autorisation nécessaire. Les détenues enceintes ou nouvellement
accouchées ne bénéficient pas de traitement particulier.
Une
femme qui accouche peut garder son enfant pendant sa détention.
Les autres femmes ne peuvent pas être incarcérées
avec leur enfant. Les enfants ne sont pas logés séparément
des autres détenues. Ils ne font l'objet d'aucune attention particulière.
L'administration ne met à la disposition des mères
ni garderie ni crèche. L'enfant sortant de prison est confié
à des proches ou, le cas échéant, à une institution.
Les enfants détenus avec leur mère à la prison de
Merzin (type E) vivent dans les cellules collectives. Aucun équipement
spécial n'est prévu pour eux. Ils partagent le lit de leur
mère.
Les
sanctions à l'encontre des détenues sont, le plus
souvent, la suppression jusqu'à 3 mois du droit de visite et de
correspondance, et le placement en cellule disciplinaire. La circulaire
du 3 novembre 1997 stipule que, dans tous les établissements pénaux,
les cellules disciplinaires doivent désormais avoir une superficie
de 9 à 10m2 au sol, avec une vitre de 100 x 75 cm, une
douche, des w-c, et l'accès à une cour pour la promenade
et les exercices physiques. En cas d'impossibilité d'accéder
à une cour, les personnes détenues doivent pouvoir effectuer
au moins 1 h 30 d'exercices séparément des autres
détenu(e)s.
Les six cellules d'isolement de la prison d'Ünje ont une superficie
de 10m2. Elles sont équipées de lits et d'un coin toilette
partiellement séparé. La lumière est artificielle
et insuffisante, de même que la ventilation.
À la prison de Mersin, les cellules d'isolement mesurent 7m2 et
sont équipées d'un lit, d'un w-c et d'un lavabo. L'éclairage
naturel est insuffisant et la lumière artificielle mal adaptée.
Quelques cellules, d'une superficie de 3 m2, sont très sombres
et mal ventilées.
La plus sévère sanction à l'encontre des mineures
incarcérées à Izmir est le placement à l'isolement
pour une durée de 15 jours. Les quatre cellules d'isolement mesurent
moins de 5m2 chacune, ne comprennent ni table ni chaise et sont sales.
Des plaques métalliques obstruent les fenêtres. L'éclairage
artificiel demeure constamment allumé. En 1997, les mineures placées
à l'isolement sont privées de sorties, n'ont pas le droit
de lire ni d'avoir de linge de rechange ou de prendre de douche.
Les
relations entre le personnel et les personnes détenues à
la prison d'Ünye sont particulièrement pauvres. Le personnel
intervient auprès des détenues uniquement pour effectuer
des contrôles, notamment les 3 contrôles journaliers obligatoires.
Les
détenues peuvent bénéficier d'une visite d'une
heure toutes les semaines. Seules les personnes portant exactement le
même nom de famille que la détenue sont autorisées
à la visite. Les visiteurs et les visiteuses font fréquemment
l'objet de fouilles dégradantes. Les entretiens se déroulent
dans des parloirs obscurs et bruyants, parfois sans possibilité
de se voir ou de s'entendre. La plupart des parloirs sont démunis
de siège. Des gardes sont présents pendant les visites.
Les courriers font l'objet d'une censure. Les photographies, les
cartes de vux ou les fleurs sont systématiquement confisquées.
Les visites fermées dans les prisons d'Izmir, de Mersin et d'Ünye
ont lieu dans de petits parloirs, très bruyants et surpeuplés.
Une vitre sépare les détenues des visiteurs et visiteuses.
Les visites ouvertes sont autorisées une fois par mois. Les femmes
détenues à la prison d'Izmir peuvent avoir des visites ouvertes
avec leurs enfants jusqu'à l'âge de 10 ans.
Les
détenues n'ont pas, le plus souvent, accès aux formations.
Aucun cours d'alphabétisation n'est proposé, en dépit
du nombre élevé de femmes détenues illettrées.
Toutes les filles détenues à la prison pour mineur(e)s d'Izmir
suivent des cours de couture, en 1997.
Les
activités des détenues sont principalement la lecture,
parfois la télévision et la radio. Les cassettes
de musique kurde et les livres en kurde ne sont pas autorisés.
Certains périodiques sont interdits, notamment ceux qui ne sont
pas écrits en langue turque.
Une aile de la prison d'Izmir centralise les activités telles que
le cinéma, la salle de sport, la bibliothèque et la mosquée.
L'organisation des activités est déficiente.
En 1997, aucune activité sportive n'est possible et la salle de
cinéma n'a pas servi depuis des années. Seule la bibliothèque
semble fonctionner correctement. Elle compte 5 000 ouvrages. Les détenues
peuvent acheter des journaux, livrés quotidiennement à la
prison. En 1997, aucune femme emprisonnée à la prison de
Mersin (type E) n'a accès aux activités autres que la télévision
et la lecture. Pour passer le temps, certaines confectionnent des fleurs
artificielles en cellule.
Les filles détenues à la prison d'Izmir n'ont pas accès
aux activités sportives ou culturelles, contrairement aux garçons.
Le
travail est, de façon générale, inaccessible
aux détenues. Les rares détenues qui travaillent peuvent
ne pas toucher leur salaire. Les travaux proposés sont liés
à l'entretien de la prison comme la cuisine, la laverie ou le nettoyage.
La
loi antiterroriste est à l'origine de nombreuses limitations du
droit à la défense. Elle autorise 4 jours de détention
au secret, une pratique qualifiée d'inacceptable par
le CPT. Il est communément admis que la détention au secret
favorise les actes de torture. La présomption d'innocence n'est
pas reconnue devant les cours de sûreté de l'État.
Les accusées doivent prouver qu'elles ne sont pas coupables des
faits qui leur sont reprochés. Les aveux extorqués sous
la torture sont reconnus valables par ces tribunaux. La confidentialité
des entretiens avec l'avocat(e) n'est pas respectée. Les personnes
accusées dans une même affaire ne peuvent pas se réunir
avec leur avocat(e). Les avocat(e)s peuvent subir des harcèlements
(écoutes téléphoniques, menaces, injures) et avoir
des difficultés à obtenir des documents concernant leurs
clientes.
L'avocate Sevil Dalkiliç, âgée de 33 ans, est condamnée
à 30 ans de prison en 1997. Elle subit des tortures pendant son
interrogatoire. Elle avait accepté d'enquêter sur la mort
suspecte d'une personne d'origine kurde, à laquelle l'État
ne serait pas étranger.
Des boîtes aux lettres sont disposées afin de permettre aux
personnes détenues de communiquer directement, en confidentialité,
avec le ministère de la Justice. Le procureur de la justice dispose
des clefs de la boîte, dont il relève le contenu régulièrement
pour le transmettre au ministère. Les détenues n'accordent
pas leur pleine confiance à ce système : certains courriers
n'auraient pas été transmis. Elles n'ont pas non plus un
accès régulier aux boîtes.
En vertu de récentes modifications de la législation, les
enfants doivent désormais se voir attribuer un(e) avocat(e) à
tous les stades de l'enquête, y compris en cas de crimes relevant
de la compétence des cours de sûreté de l'État.
Tout interrogatoire préliminaire d'un(e) mineur(e) soupçonné(e)
de crime doit être conduit par le procureur en personne, ou par
des assistants qu'il aura désignés.
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